L’ex-maire Vaillancourt a régné sur Laval pendant 23 ans. Et un peu, aussi, sur le Québec ?
Ils se moquent des policiers, des procureurs et des journalistes, dont les enquêtes se heurtent année après année au pouvoir du maire téflon. Il faut dire qu’ils ont du poids, car leur île abrite six circonscriptions électorales provinciales, qui peuvent faire pencher la balance du pouvoir d’un côté ou de l’autre, au gré du vent.
Un élément alimenterait l’intrigue tout au long du film : les hauts dirigeants politiques ont-ils protégé depuis 20 ans ce maire qui savait si bien les aider à se faire élire et qu’il eût été risqué d’indisposer ? Thomas Mulcair pourrait y faire une brève apparition. Après tout, en 2011, le chef du NPD a déclaré à L’actualité que le premier ministre Jean Charest lui avait déjà dit, à propos d’un projet de loi sur la protection des milieux humides qui aurait freiné des programmes de construction immobilière, « qu’il ne pouvait pas faire ça au maire Gilles Vaillancourt. On avait trop besoin de lui pour les élections. »
Laval n’étant pas Hollywood, il est encore trop tôt pour dire si la saga judiciaire commencée en mai avec le dépôt d’accusations contre 37 professionnels et entrepreneurs — le « gang de Laval » — nous donnera à terme la clé de l’intrigue. Les enquêteurs de l’Unité permanente anticorruption (UPAC) n’ont pas lésiné pour bâtir leur preuve : plus de 30 000 conversations enregistrées, 70 perquisitions, 150 interrogatoires. Les comparutions, attendues en juillet, devraient nous en apprendre plus.
Voir au banc des accusés des ingénieurs, un notaire et des avocats qui se croyaient au-dessus des lois n’est qu’un premier pas. D’autres devront suivre : récupérer les biens publics mal acquis (une partie, du moins !), renforcer la démocratie municipale pour la sortir de l’obscurité qui a permis à la criminalité d’y plonger des racines, soutenir l’information locale afin qu’elle soit un vrai chien de garde pour les citoyens. Ces trois chantiers sont encore loin d’être amorcés.
Le Bureau de lutte aux produits de la criminalité (BLPC) devra travailler à bloquer les comptes et à récupérer les 15 millions que l’ex-maire Vaillancourt aurait mis à l’abri dans des paradis fiscaux, comme la Suisse et le Panamá.
Les Lavallois devront prouver en novembre prochain qu’ils peuvent faire sauter le plafond de 35 % auquel stagne le taux de participation aux élections municipales depuis 10 ans. Sept partis y seront en lice ! Il faut élire les Eliot Ness pour que la troisième ville du Québec redevienne digne de confiance.
Bien sûr, nous avons tous des emplois, des enfants à élever, et bien peu de temps pour assister aux séances des conseils d’arrondissement. Mais lorsque personne ne veille, la criminalité fleurit. Il faut redonner du mordant aux chiens de garde : soutenir les journalistes et les citoyens teigneux !
J’ai commencé ma carrière dans un hebdo local, il y a plus de 30 ans. Et j’ai été congédiée après avoir écrit un éditorial qui avait déplu à un puissant de l’époque. Les journalistes du Courrier Laval connaissent bien cette forme d’intimidation. On ne saurait trop redire l’importance d’une presse locale forte. Malheureusement, la situation économique oblige bien des médias à mettre la pédale douce à leurs projets de couverture locale.
Les Québécois savent maintenant que leurs impôts municipaux ont enrichi des gens sans scrupules. La justice punira les coupables. Mais empêcher le retour des vilains devra être une œuvre collective.
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Au Québec, le taux de participation aux deux dernières élections municipales a stagné à 45 %. En 2001, il était de 55 %. À Toronto et à Calgary, il a grimpé en flèche à la dernière élection, atteignant 54 % et 53 %.
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