Du haut des marches du Lincoln Memorial à Washington, c’est un président noir qui prendra la parole ce 28 août prochain… Cent cinquante ans après la proclamation d’émancipation mettant fin à l’esclavage… Cinquante ans jour pour jour après que Martin Luther King ait mené une marche et prononcé son célèbre discours devant 250000 activistes rassemblés sur le Mall… Six mois (oui, SIX !) après que le Mississippi ait enfin ratifié l’abolition de l’esclavage… Dix-huit mois après la mort de Trayvon Martin et 40 jours après l’acquittement de son assassin.
Lorsqu’il prononce son discours à Washington, en août 1963, le docteur King donne une impulsion sans précédent à la lutte pour les droits civiques au point même où un mémo du FBI en date du 30 août, indique qu’il s’agit là « du plus dangereux des nègres » (sic) pour la sécurité nationale.
Il faut dire que les Etats-Unis sont, dans les années 60, marqués par de profondes lignes de fractures et que le Sud-Est peine à s’ajuster à une réalité qu’il refuse. Au Mississippi, alors, il se pratique encore une forme de servage où, malgré l’abolition de l’esclavage un siècle plus tôt, un certain nombre de familles afro-américaines, sont maintenues dans l’ignorance et continuent à être asservies, battues, terrorisées. Medgar Evers est d’ailleurs assassiné seulement deux mois avant que King ne mène la marche vers Washington. Or la lutte pour les droits civiques s’intensifie au cours de l’année 1963 (elle culminera et trouvera une résonance nationale avec le Freedom Summer au cours de l’année suivante). Elle mènera à l’adoption l’année suivante du Civil Rights Act puis l’année d’après à l’adoption du Voting Rights Act. Mais aussi à la mort de MLK, tombé sous les balles d’un suprématiste blanc, au Lorraine Hotel à Memphis, au Tennessee, cinq ans plus tard.
Néanmoins, aujourd’hui encore, rien n’est joué tel qu’en témoigne l’invalidation d’une partie du Voting Rights Act par la Cour suprême en juin dernier. En effet, les acquis en termes d’égalité demeurent fragiles et même parfois illusoires. En 2008, la symbolique de l’élection d’un président afro-américain était forte (mais à l’inverse, la prégnance de la mouvance du Tea Party l’est tout autant) et c’est sans doute dans cet esprit que le président Obama a inauguré, il y a deux ans, un mémorial à Washington, en l’honneur du Pasteur King. Car la progression de l’extrême droite aux Etats-Unis est réelle.
Quelques données sur les inégalités et le racisme aux États-Unis
Alors que la communauté afro-américaine représente à peine 13% de la population totale aux États-Unis :
- 25,8% des Américains vivant sous le seuil de la pauvreté sont afro-américains alors que le taux de pauvreté national (toutes origines confondues) se situe à 14,3% ;
- Le salaire moyen des familles afro-américaines est de 38 400$ alors que la moyenne nationale (toutes origines confondues) est de 60 000$ ;
- Près de 20% des Afro-américains ont étudié au niveau post-secondaire alors que la moyenne nationale (toutes origines confondues) frôle les 30% ;
- Sur les quelques 770 000 citoyens incarcérés, plus de 300 000 sont afro-américains .
Source : U.S. Census Bureau
Professeure associée au département de géographie de l’UQAM et directrice de recherches à la Chaire @RDandurand @UQAM
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