Faut-il laisser élargir la concurrence dans les télécommunications mobiles en laissant la porte ouverte à un grand joueur américain ? Faut-il la restreindre dans le marché du livre et empêcher de grands groupes américains de trop baisser les prix des nouveautés ?
Voilà deux grands débats passionnants où les solutions des deux paliers de gouvernement sont totalement asymétriques.
D’un côté, le ministre fédéral de l’Industrie, James Moore, trouve que le prix des télécommunications mobiles est trop élevé au pays et fait le pari qu’une concurrence accrue avantagera les consommateurs canadiens. Il part du principe qu’il faut donner de l’oxygène aux consommateurs, quitte à froisser les grands opérateurs de téléphonie mobile canadiens et favoriser l’entrée d’un géant américain sur notre marché.
Ce débat cache des enjeux réels. Par exemple, les grands groupes canadiens seront-ils défavorisés lors des enchères pour les services mobiles à large bande, en janvier prochain ? Qu’arriverait-il si Verizon, aux ressources quasi inépuisables, mettait la main sur deux des quatre blocs de spectre au Québec ? Cela pourrait-il signifier que deux opérateurs actifs aujourd’hui seraient rapidement déclassé s? Une telle situation pourrait présenter un recul au niveau de la concurrence.
De son côté, le gouvernement du Québec n’a pas énoncé de position définitive quant à la réglementation du prix du livre. Les interventions en commission parlementaire du ministre Maka Kotto montrent néanmoins qu’il penche du côté de la réglementation.
Le raisonnement prend le contre-pied de celui du gouvernement fédéral en matière de télécommunications. Il faudrait en effet limiter la concurrence des grandes surfaces qui serait dommageable à la survie des plus petits détaillants. Que le consommateur profite de la situation actuelle pour payer ses livres moins cher devient secondaire face à la nécessité de maintenir en vie un réseau de détaillants dont l’existence serait l’incarnation vivante de la culture. Le tout est enrobé d’un discours qui tend à soustraire en partie la culture des rapports marchands habituels.
J’ai déjà écrit sur le sujet et déjà défendu sur ce blogue (et ailleurs) la fameuse «exemption culturelle». Dans le dossier présent, je n’arrive tout simplement pas à assimiler le principe voulant que les consommateurs de Wal Mart et d’une petite librairie de quartier soient les mêmes et que les ventes de l’un aient des répercussions sur celles de l’autre. Je ne comprends pas non plus comment une hausse de prix va favoriser l’achat de livres et l’apparition de nouveaux lecteurs. N’oublions pas qu’il n’y a pas de détaillants de livres sans lecteurs.
Je me demande enfin si la précarité des librairies n’est pas d’abord le reflet de la dématérialisation des produits culturels. Il n’y a presque plus de disquaires et il n’y aura plus bientôt de clubs vidéos. A-t-on cessé pour autant d’écouter de la musique ou de visionner des films ?
Au lieu de protéger certains opérateurs, producteurs ou diffuseurs, je crois qu’il faut d’abord s’intéresser au consommateur. Même si je trouve le gouvernement fédéral imprécis dans sa démarche, j’aime mieux d’instinct des mesures qui me permettent de payer moins cher que d’autres qui me promettent de payer plus cher.
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