MONTRÉAL – Le gouvernement Couillard utilisera les importants surplus énergétiques pour offrir un rabais sur les tarifs d’électricité industriels, mais il semble fermer la porte à un congé de hausses pour les clients résidentiels d’Hydro-Québec.
Les ministres de l’Énergie, Pierre Arcand, et de l’Économie, Jacques Daoust, ont annoncé mardi un rabais de 20 pour cent sur les tarifs réglementés actuels afin d’encourager l’investissement et la venue de nouveaux projets dans la province.
«Le Québec a connu une diminution de ses besoins en énergie, évidemment à cause des difficultés dans le secteur des pâtes et papiers, combinée à une augmentation de l’offre», a affirmé M. Arcand pour justifier les surplus.
D’après les estimations des deux ministres, ce nouveau tarif industriel devrait engendrer, entre 2015 et 2024, des retombées fiscales de plus de 800 millions $ pour le gouvernement grâce à l’activité économique accrue.
Si la Régie de l’énergie donne son feu vert à la demande du gouvernement Couillard, cette nouvelle mesure devrait notamment stimuler les domaines où la consommation d’électricité est importante, comme la métallurgie, le cuivre et la transformation de l’acier.
D’une durée maximale de 10 ans, elle sera toutefois accompagnée d’une «période de transition» vers le tarif courant.
Le ministre Daoust estime qu’il n’y aura pas de concurrence déloyale puisque divers moyens seront mis de l’avant afin de préserver les acquis d’entreprises déjà établies si une compagnie du même secteur devait s’installer au Québec.
«Il se peut que 95 pour cent de cette nouvelle tarification s’inscrive dans un développement où il n’y a pas d’aspects négatifs, a-t-il dit. Nous allons gérer les exceptions. Je n’accepterai pas que l’on ferme des entreprises parce qu’on en amène des nouvelles.»
M. Daoust donné l’exemple de l’annonce de l’arrivée du géant espagnol FerroAtlantica à Port-Cartier, sur la Côte-Nord, qui a soulevé des inquiétudes chez Silicium Québec à Bécancour.
«J’ai rencontré les dirigeants de Silicium Québec pour ne pas qu’il y ait de concurrence déloyale, a-t-il dit, sans entrer dans les détails. Notre rôle est de créer un environnement favorable et on ne choisira pas les gagnants.»
Les entreprises déjà présentes au Québec pourront bénéficier de ce tarif réduit, mais uniquement si elles mettent de l’avant des nouveaux projets qui répondent à la liste de critères du gouvernement du Québec.
Pour le ministre de l’Économie, il serait très surprenant de voir certaines entreprises, comme les alumineries, brandir la menace d’une délocalisation afin de bénéficier du nouveau tarif.
«C’est un dossier particulier, les alumineries, a affirmé M. Daoust. Nous avons déjà une entente avec Alcoa. Rio Tinto a son barrage et nous discutons avec l’Aluminerie Alouette. Les alumineries, c’est beaucoup plus large qu’une entreprise (régulière) comme une fonderie.»
Si elle accueille favorablement cette nouvelle mesure tarifaire, l’Association québécoise des consommateurs industriels d’électricité croit qu’il s’agit d’une preuve de l’inefficacité du tarif L, accordé aux grands consommateurs d’électricité.
«C’est une reconnaissance implicite, a observé son directeur exécutif, Luc Boulanger, en entrevue. L’actuel tarif L ne fait pas le travail et n’attire pas de nouvelles installations au Québec. Il s’agit d’une problématique sur laquelle il faut absolument se pencher.»
Ce dernier s’est toutefois montré satisfait de constater que l’introduction du nouveau tarif d’électricité se fera à «coût nul». Il accueille de plus favorablement les mesures mises de l’avant pour prévenir la concurrence déloyale.
«Ce tarif, financé par l’ensemble des usagers, ne devrait pas avoir un impact sur les coûts actuellement en cours», a dit M. Boulanger.
L’Industriel différend du résidentiel
Le ministre Arcand ne s’est toutefois pas montré ouvert à l’idée d’utiliser les importants surplus d’électricité pour accorder un congé de hausses aux clients résidentiels d’Hydro-Québec. Le 1er avril dernier, la société d’État avait entre autres reçu le feu vert pour augmenter ses tarifs de 4,3 pour cent.
«Il faut séparer l’industriel du résidentiel, a affirmé M. Arcand. Si l’on inclut cette augmentation et qu’on observe les 10 dernières années, on s’aperçoit que la moyenne des hausses a été de 1,8 pour cent. Il faut regarder sur un horizon de 10 ans.»
M. Arcand a rappelé que le gouvernement Couillard avait adopté un décret visant à faire part de ses préoccupations à la Régie de l’énergie quant à la plus récente demande d’augmentation tarifaire de 3,9 pour cent de la société d’État.
«Sur l’éolien, un groupe de travail remettra un rapport sur cette question en décembre, a ajouté le ministre de l’Énergie. Il n’y aura pas d’appels d’offres sur l’éolien au moins jusqu’au début 2016.»
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